CCN : se développer pour renforcer notre audience

On a la feuille de route pour les semaines, les mois à venir, indiquait Yves Veyrier, le secrétaire général de la confédération, en conclusion du Comité confédéral national FO des 27 et 28 mai. Et cette feuille de route, actée par la résolution générale adoptée à l’unanimité du CCN, est claire. Par le développement renforcé de l’organisation, via de nouvelles implantations et un essor de ses syndicats, il s’agit de conforter le poids syndical de Force Ouvrière pour une audience syndicale de 20 % à l’échelon national interprofessionnel dans quatre ans. Une attention particulière est portée aux élections professionnelles, tant dans les entreprises que dans la fonction publique. Mobilisée dans toutes ses strates, l’organisation s’adresse aussi aux jeunes afin de les sensibiliser davantage encore à l’intérêt de la syndicalisation et les amener à rejoindre FO.
Nos revendications n’ont jamais été confinées depuis la pandémie et les nombreuses mobilisations, qui ont apporté des victoires ont souligné les délégués devant le CCN, en sont la preuve. Alors que perdure la crise sociale mais aussi les attaques des pouvoirs publics et du patronat contre les travailleurs, lesquels font face, entre autres, aux contre-réformes, à la difficulté d’un exercice syndical toujours entravé par l’état d’urgence sanitaire, à une remise en cause de leurs droits et aux menaces sur l’emploi, FO confirme sa détermination à combattre. Pour le CCN, il y a nécessité d’une action interprofessionnelle,  la grève s’il le faut. Sa construction passera par l’information et la mobilisation des militants, par l’organisation de réunions, rassemblements et meetings, pour se préparer à l’action.

 


Pour gagner, une détermination à toute épreuve

D ans la crise sanitaire, économique et sociale, les militants FO ne restent pas l’arme au pied, ils bataillent pour faire aboutir leurs revendications, dans des luttes souvent âpres mais apportant des victoires. Ainsi, nombre de mobilisations ont été évoquées lors de ce CCN, à l’instar de celle, fin mai, des assistantes dentaires de la clinique mutualiste de Grenoble. Elles ont obtenu une victoire salariale (revalorisation de 130 à 160 euros) après huit jours de grève, indiquait Philippe Beaufort (UD FO de l’Isère) pointant par ailleurs le contexte social dégradé dans le département. Si le gouvernement veut mettre une chape de plomb sur le modèle social, nous ne le laisserons pas faire, lançait Sébastien Busiris. La nature des revendications de FO, sur les retraites ou encore l’Assurance chômage, et la détermination à les faire valoir, font écho. Ainsi, l’UNSA-RATP a rallié les rangs de l’organisation, même chose chez Amazon, sur le site de Brétigny, se réjouissait Christophe Le Comte (UD 91).

Rappelant les actions, dont la dernière le 8 avril dans le secteur social et médico-social pour l’obtention de la mesure salariale du Ségur, Pascal Corbex (Action sociale) évoquait aussi le combat contre le démantèlement de l’enseignement spécialisé et la demande d’un vrai statut pour les accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH). Plusieurs syndicats dont quatre structures FO (FNEC FP-FO, FAGE-FO, Action sociale, SPS-FO) appelaient à une grève le 3 juin.

 Il n’y a que des salariés et pas des salariés de deuxième ou troisième ligne

Les salariés sont moroses, il faut plus que jamais les soutenir, soulignait Jean-François Duflot (UD du Nord), tandis que Pierre Compain (UD 92) fustigeait des aberrations insupportables sur le terrain des entreprises. Et de citer BioRad, société américaine de développement de tests biologiques pour les laboratoires qui a vu sa cotation en Bourse progresser de 46 %, mais a annoncé en février 280 suppressions d’emplois en France dont 50 dans les Hauts-de-Seine et avec délocalisation du site en Asie. Pour le département de l’Aisne, François Pozzo di Borgo s’élevait contre les licenciements annoncés chez Camille Fournet, entreprise de maroquinerie sous-traitante d’enseignes de luxe et qui a reçu des aides de l’État. Didier Birig (SPS-FO), annonçant quant à lui une prochaine campagne de la fédération contre la fermeture des lits et pour les emplois dans la santé, pointait par ailleurs le terme de salariés de deuxième ligne, utilisé par le gouvernement, visant ainsi à insinuer que ces personnels (les territoriaux notamment) mériteraient moins que d’autres la revalorisation salariale pour laquelle la fédération FO se bat. Plus largement, à l’échelon de l’interfédérale FO de la fonction publique, la lutte se poursuit pour le dégel du point et la revalorisation des carrières, indiquait Christian Grolier.  Il n’y a que des salariés et pas des salariés de deuxième ou troisième ligne, martelait Patrice Clos (FO-Transports) tandis que Pascal Samouth (UD de la Haute-Loire) listait les conflits dans son département, notamment une grève mi-mai chez AltiLabo où les revendications salariales perdurent, et une autre gagnante, sur les salaires aussi, cet hiver chez BricoCash.

Les travailleurs n’abandonnent pas

En Charente, au lieu de la restructuration envisagée, l’entreprise Leroy Somer (alternateurs et moteurs électriques) créera cent emplois annonçait, soulagé, Henry Lalouette, ajoutant que Schneider Electric restera bien à Angoulême. Tout cela a été obtenu car les copains se sont battus. Si les récentes mobilisations n’ont pas pris la forme de grands mouvements, elles veulent dire que les travailleurs n’abandonnent pas, confirmait Philippe Mano (UD de la Gironde).  Il faut surtout obtenir des résultats, une réponse positive à nos revendications, insistait Frédéric Homez (FO Métaux) évoquant ce qui a été obtenu, au cœur de la crise, dans les secteurs de la fédération, par exemple dans l’aéronautique, un accord sur les salaires et pas de départs contraints. C’est plutôt pas mal pour préserver l’emploi et les salaires.

Face aux attaques et difficultés  il ne faut pas se résigner, déclarait Zaïnil Nizaraly (FEETS-FO), citant notamment la lutte des salariés du nettoyage pour des revalorisations et primes. Dans ce secteur, un nouveau prestataire, qui avait remporté le marché du bio-nettoyage dans plusieurs hôpitaux parisiens, a voulu attaquer les conditions de travail et supprimer des emplois. Mais on a gagné, résumait fièrement le militant, précisant la force de FO dans ce secteur avec un taux de syndicalisation de 100 %.

Valérie Forgeront
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Objectif : 20 % d’audience syndicale dans quatre ans

Procéder à la modernisation du protocole d’adhésion et de gestion des cotisations, ce qui comprend le recours accru à l’outil numérique pour une gestion facilitée des adhérents et des échanges d’information, accroître le nombre des implantations syndicales, se donner les moyens de toucher plus efficacement les jeunes mais aussi les cadres, afin de les sensibiliser à la syndicalisation et les amener à rejoindre FO, œuvrer à renforcer la performance de l’AFOC, sensibiliser aussi, en lien avec l’UCR, les jeunes retraités au fait de rester syndiqués, s’investir dès à présent dans les différentes élections professionnelles à venir… Il s’agit donc de travailler d’arrache-pied, résumait Yves Veyrier, le secrétaire général de la confédération, listant ces axes qui convergent vers un même but : le développement de l’organisation. Cela participant de la volonté de renforcer encore l’audience de FO, tandis que la prochaine mesure de représentativité au plan national et interprofessionnel aura lieu dans quatre ans.  Fixons-nous l’objectif de 20 %, proposait Yves Veyrier. Quelques jours plus tôt, les résultats pour la mesure du cycle 2017-2021 confirmaient la troisième place de FO. Une audience confortée donc et cela constitue un point d’appui de conquêtes d’implantations et de syndicalisation, soulignait la confédération.

Ce qu’ont évoqué beaucoup de délégués lors du CCN. Les élections dans les TPE, malgré leur très faible taux de participation, sur fond de crise sanitaire, ont apporté des preuves du travail de terrain déjà effectué. Dans plusieurs branches nous sommes premiers, nous restons représentatifs partout au niveau des TPE qui relèvent de la fédération de la Métallurgie. Nous faisons 24 % dans les services auto, indiquait Frédéric Homez (FO Métaux).

Toute l’organisation doit s’impliquer

FO passe deuxième, devant la CFDT, dans les transports urbains. On gagne 4 points, notait entre autres Patrice Clos (Transports et Logistique). La FGTA-FO est première dans la coiffure, deuxième chez les particuliers employeurs et a retrouvé une représentativité chez les assistantes maternelles, informait Laurent Rescamier, évoquant l’avenir et se déclarant ainsi  favorable à la dématérialisation de la carte, système qui s’appuierait sur l’outil e-FO, envisage la confédération. Il saluait d’ailleurs au passage l’implication de toute l’organisation pour l’élection TPE…. Et en matière de développement, les militants redoublent d’idées. L’UD des Pyrénées-Orientales prévoit par exemple  d’aller au-devant des CSE où il n’y a aucune appartenance syndicale, annonçait Jérôme Capdevielle. La fédération SPS-FO vise elle à créer quatre syndicats supplémentaires, deux par branche, dans nos groupements départementaux. Cela aboutirait à 400 structures/listes supplémentaires aux élections, indiquait Didier Birig. Éric Péres (Cadres/UCI) rappelait quant à lui qu’il y a  trois millions de cadres dans le pays, et donc un grand travail reste à faire. Et de noter que  depuis la crise, l’UCI reçoit deux demandes d’adhésion par semaine.

Valérie Forgeront
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Respect du droit syndical : la confédération hausse le ton

La question du respect de l’exercice syndical et des droits qui lui sont relatifs a pris part aux débats du CCN. Des droits trop souvent attaqués et notamment depuis la crise sanitaire, que ce soit dans les entreprises ou encore via les menaces que portent certaines réformes, ont souligné plusieurs délégués. Hubert Raguin, membre de la CE, appelait ainsi à  s’adresser aux pouvoirs publics » afin de dire « qu’il faut mettre fin à l’état d’urgence, tandis que Patrice Clos (Transports et Logistique) lançait :  Il est temps que les ordonnances Covid cessent ! Hervé Quillet (Chimie) revenait quant à lui sur les agressions particulièrement graves du 1er Mai envers des syndicalistes, et Frédéric Bochard (UD du Puy-de-Dôme) sur le saccage, en avril dernier, de l’UD FO de Clermont-Ferrand. Cette action, indiquait-il, a un cadre, nous sommes attaqués comme organisation syndicale. Sébastien Busiris (FEC) évoquait  les pressions dans le privé comme dans le public sur nos délégués, des mesures de licenciement comme à Pôle emploi, dans le commerce…. Et Serge Feuga (FEC) précisait : À Pôle emploi, les droits à détachements syndicaux diminuent de plus en plus.

Une campagne de défense de nos délégués

Si le respect des droits, de la capacité à les exercer, procède aussi des moyens syndicaux, ces derniers sont plus que malmenés et cela en lien avec les réformes suivies depuis des années, entre autres dans la fonction publique. Philippe Grasset (FO-Finances) pointait ainsi la diminution à venir de ces moyens dans son secteur, cela  car il y a eu 10 000 suppressions d’emplois en quatre ans dans le périmètre ministériel, et déjà un tiers de nos droits ont été supprimés en deux ans. Plus largement, Christian Grolier confirmait l’inquiétude à l’échelon de toute la fonction publique : Il y a une réduction des droits et des moyens syndicaux. Et dans la fonction publique on ne peut plus négocier, tout passe par ordonnances. On est dans un problème démocratique de fond ! Dans un courrier adressé le 31 mai au Premier ministre, la confédération a fait part de son exigence d’une levée de l’état d’urgence et du rétablissement de tous les droits et libertés, essentiels à l’exercice plein et entier des droits syndicaux. Dans cette même lettre, elle souligne que plusieurs des membres du CCN ont fait état de situations de discriminations, subies par des délégués FO et liées à leur activité syndicale, dans des entreprises ou administrations, mentionnant des pressions, menaces, sanctions, tant dans le secteur privé que public. Le CCN nous a donné mandat d’engager une campagne de défense de nos délégués victimes de ces agissements.

Valérie Forgeront
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Lutter contre ces réformes c’est défendre le pacte républicain

Nous sommes opposés à la contre-réforme des retraites et à celle sur l’Assurance chômage qui diminue drastiquement les droits des demandeurs d’emploi, lançait à la tribune Stéphane Renaud (UD de Haute-Savoie), soulignant ainsi le combat que mène toute l’organisation FO contre celles-ci. Et ce ne sont pas les seules. Il y a une avalanche de réformes, listait Hubert Raguin. Et on s’en prend au ventre des travailleurs !, s’indignait Éric Le Courtois (UD des Côtes-d’Armor). Dans le monde d’après, il y a toujours moins de services publics, pointait Zaïnil Nizaraly (FEETS-FO), et les réformes structurelles, telle la loi de transformation, s’accumulent dans la fonction publique sans que ne soit réalisé un bilan, ce que demande régulièrement FO. Le projet de loi 4D prévoit par exemple, indique le militant, un transfert d’une nouvelle partie du réseau routier aux régions, lesquelles pourraient alors appliquer des taxes !.

Restructurations, statuts attaqués, missions chamboulées…

Dominique Regnier (Territoriaux FO) relayait : Ce projet, c’est la suite des lois Maptam, NOTre… Cela participe d’un démantèlement de l’égalité de traitement des citoyens (…) et on est en train de casser les lois [sur les statuts, NDLR] de 1983 et 1984. Philippe Grasset (FO-Finances) fustigeait la réforme OTE (organisation territoriale de l’État) qui, entre autres, restructure, après déjà une réforme en 2010, les directions régionales créant des DRETS, DETS et autres DDETSPP aux missions hétéroclites. Cette réforme donne toute-puissance aux préfets », et provoque une grande « désorganisation, dénonçait François Guérard (FAGE). Quant à la réforme de la Haute fonction publique, l’exécutif voudrait des personnels interchangeables comme aux États-Unis, une politisation des fonctionnaires alors que les grands corps de l’État travaillaient sur la base de la neutralité et de l’indépendance. Plus largement, résumait Christian Grolier, les services publics, la Sécu, les retraites, tout cela est le pacte républicain, et il subit des attaques, fortes.

 

La détermination de FO à s’opposer à des réformes destructrices de droit est tout aussi forte.

Valérie Forgeront
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 Valérie Forgeront Journaliste à L’inFO militante

L’Info Militante